Une importante mission scientifique qui devait se rendre en Haïti du 6 au 12 octobre prochains et à laquelle devait participer cinq scientifiques et spécialistes de la conservation de la mer, a été reportée à cause de la crise.
« Cela fait presqu’un mois qu’il n’y a pas de carburant à Petite-Rivière-de-Nippes », se désole Franklin Barber de Haiti Ocean Project. Aucune station d’essence n’est ouverte et il faut se battre pour trouver un gallon d’essence dans cette commune de l’arrondissement de Miragoâne. Les ennuis ne s’arrêtent pas là : « l’Internet ne fonctionne presque plus avec Natcom ; idem pour les lignes téléphoniques. Même l’eau potable est difficile à trouver maintenant », ajoute-t-il.
Ce coordinateur du projet de protection des tortues de l’organisation à but non lucratif, Haiti Ocean Project, est désemparé car il ne peut plus sauver les espèces menacées : « cette semaine, des pécheurs à Anse-à-Veau ont encore tué huit tortues et je n’ai rien pu faire pour les sauver car je n’avais pas de carburant quand on m’a prévenu qu’elles avaient été capturées », regrette-t-il. Rien que dans le village de Grand Boucan, ce sont mille (1.000) tortues qui sont massacrées chaque mois pendant la saison, qui s’étend d’avril à octobre.
La pénurie de carburant a toutefois un aspect positif : ces jours-ci, elle empêche aux pêcheurs artisanaux de prendre la mer avec leurs bateaux à moteur et de tuer des espèces marines telles que les requins, les raies, les dauphins et autres espèces qui font la richesse de notre faune marine. Par contre, elle n’épargne pas les tortues qui sont plus vulnérables et sont capturées avec des filets.
Haiti Ocean Project , une organisation de conservation de la mer marine à but non lucratif, basée depuis 2007 à Petite-Rivière-de-Nippes, avait organisé la venue d’une importante mission d’experts en biodiversité marine et a dû l’annuler.
« Cette mission avait de nombreux objectifs, dont la formation des membres d’Haïti Ocean Project sur la prise de rayons X et la pose d’étiquettes d’identification sur les tortues marines, la procédure à suivre pour placer une étiquette satellite sur un requin océanique juvénile », a déclaré Jamie Aquino, Présidente et Fondatrice de Haiti Ocean Project. Ces scientifiques américains devaient également visiter des zones telles que Grand Boucan, Les Basses et l’île de Boman, où un grand nombre de tortues de mer, de requins et de raies sont tués. Des rencontres avec des pêcheurs locaux et des jeunes étaient prévues pour organiser des ateliers d’éducation marine.
Les membres de cette mission incluaient: Jamie Aquino , Présidente et Fondatrice de Haiti Ocean Project ; Michael Walsh, vétérinaire aquatique de l’Université de Floride ; Lucy Howey, biologiste marin et experte en requins ; Annabelle Brooks – Eleuthera, directrice du programme de recherche et d’éducation sur les tortues de mer aux Bahamas ; Steve McCullough, intervenant du centre d’éducation Dolphin Plus de Floride et expert en échouage et Courtney Vail, experte en conservation marine et bien-être animal.
Ce voyage a dû être reporté pour un certain nombre de raisons, toutes liées aux récents évènements en Haïti. « Les manifestations et la violence dans les rues se sont étendues bien au-delà de Port-au-Prince. Elles ont bloqué plusieurs zones clés entre l’aéroport de Port-au-Prince et Petite-Rivière-de-Nippes. La pénurie de carburant a entraîné l’arrêt du transport et l’absence d’essence pour les bateaux.»
Haiti Ocean Project, en plus de ses nombreuses activités pour protéger les espèces marines menacées en Haiti, prévoit d’installer le premier hôpital pour tortues d’Haiti. « Il n’était pas possible d’acheminer l’unité de rayons X pour les tortues de mer au centre de conservation marine d’Haïti Ocean Project, car elle se trouve actuellement à Port-au-Prince, où elle a récemment été embarquée sur un cargo. Les barrages routiers et la pénurie de carburant ont été un énorme problème qui a affecté tous les aspects de ce voyage, rendant impossible toute mission pour le moment », regrette Jamie Aquino.
« Il n’est pas toujours facile de réunir autant de scientifiques renommés en conservation marine au cours d’un même voyage. Ils possèdent une expertise et une expérience considérables pour nous aider. Remettre ce voyage à plus tard a été très décevant pour tous », regrette Mme Aquino.
Ces experts vont de nouveau tenter de rentrer en Haïti pour la première semaine de novembre : « nous espérons sincèrement que la situation du pays nous le permettra », a conclu Mme Aquino.
Nancy Roc