La Petrochallenger Emmanuela Douyon et le directeur exécutif du réseau national de défense des droits humains, Pierre Espérance ont été entendus, ce mardi 10 décembre, par la Commission Affaires Etrangères au Congrès américain sur la situation de crise à laquelle fait face le pays et la position de l’administration Trump vis à vis d’Haiti dans ce contexte de crise.
Dans son témoignage, Emmanuela Douyon a signifié aux membres du Congrès que la crise qui prévaut en Haïti n’est pas uniquement une crise politique, mais elle est aussi sociale et économique. « Ce n’est pas un mouvement pour changer le président et le remplacer par un autre, mais plutôt une mobilisation pour exiger le changement d’un système, des réformes en profondeur et aussi pour chasser les corrompus à la tête du pays» a-t-elle confié à la rédaction de Juno7.
En outre, la représentante de Nou Pap Dòmi a témoigné sur la position des États-Unis par rapport à la crise Haïtienne, qui ne cessent d’appeler les protagonistes au dialogue. Mme Douyon a fait remarquer au Congrès que Jovenel Moïse a laissé passer le temps du dialogue. « Il avait l’opportunité d’ouvrir un dialogue avant même que l’on réclame sa démission, il ne l’a pas fait. Ce n’est pas maintenant qu’il va le faire ». « Le fait également qu’il est « impliqué » dans des actes de corruption ne lui permet pas de dialoguer avec les acteurs, il doit « dialoguer avec un juge », a-t-elle souligné.
Sur les questions relatives à la formation d’un gouvernement et l’organisation d’élections soulevées par les États-Unis, Emmanuela Douyon a expliqué au congrès américain qu’il serait « impossible » d’aller aux élections avec cette équipe ou de cohabiter avec elle. « Nous avons signifié notre refus d’une quelconque ingérence de la communauté internationale dans les affaires internes du pays. Nous leur avons dit qu’ils [les Américains] pouvaient supporter la société civile, le mouvement petrochallenge qui exigent la reddition de compte ». «Nous leur avons dit qu’ils doivent éviter de confondre cette crise à un affrontement entre deux groupes politiques. Ils doivent être conscients que leur support à Jovenel Moïse signifie un soutien à un président faisant l’objet de graves accusations de corruption ».
De son côté, le directeur exécutif du RNDDH Pierre Espérance a présenté un tableau sombre de la situation des droits humains en Haïti. Dans sa présentation, M. Espérance a indiqué que les cas de violations de droits humains n’ont pas cessé d’augmenter dans le pays depuis le début de la crise et des manifestations antigouvernementales. Selon Pierre Espérance, plus de 478 personnes dont 44 policiers et deux journalistes ont été tuées soit par balles ou à l’arme blanche, entre janvier et décembre 2019.
D’autre part, il a dénoncé la prolifération des gangs armés dans le pays. Ces derniers, déplore-t-il, bénéficient de la protection des autorités. L’appareil judiciaire, pour sa part, est dysfonctionnel et totalement vassalisé par le pouvoir Exécutif. « La situation des droits humains en Haïti est catastrophique. Tous les indicateurs en matière d’État de droit sont au rouge. Les droits civils, politiques, économiques, sociaux sont bafoués et l’État haïtien ne fait rien pour améliorer la situation » a déclaré Pierre Espérance.
Ce dernier a également exprimé sa préoccupation par le fait que le président Jovenel Moïse va gouverner par décret à partir de janvier 2020. Il a également dénoncé l’incapacité du président de faire voter par sa majorité au parlement une loi électorale ainsi qu’un budget.
Réagissant à cette audience sur Twitter, le ministre démissionnaire des Affaires étrangères et des Cultes a rejeté les déclarations d’Emmanuela Douyon et de Pierre Esperance du RNDDH. Pour Bocchit Edmond, ces témoignages sont « sans fondement et motivés par des considérations politiques ».