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La Délégation permanente d’Haïti et l’UNESCO ont organisé, le vendredi 22 avril 2022, jour du centenaire de naissance du médecin et écrivain haïtien Jacques Stephen Alexis, une table ronde hybride à la Maison de l’UNESCO à Paris, autour du thème “Jacques Stephen Alexis et la Belle Amour Humaine”, en présence d’une cinquantaine d’Ambassadeurs et représentants de nombreuses délégations, de membres de la communauté de l’UNESCO, ainsi que de très nombreux participants en ligne.
Emmelie Prophète-Milcé, Ministre de la Culture, a ouvert, depuis Port-au-Prince, la table ronde et a, au nom de l’État haïtien, demandé pardon à la famille du romancier disparu et à sa fille Florence. Selon la Ministre, il y a, dans le monde, un consensus autour de celui qui rêvait la belle amour humaine et en Haïti, en ce jour de son centenaire, “toutes les institutions, toutes les pensées tournent autour de Jacques Stéphen Alexis”.
Firmin Édouard Matoko, Sous-directeur de la Priorité Afrique et des Relations extérieures de l’UNESCO, a souligné que “toute la communauté de l’UNESCO s’associe à cette manifestation”, avant que, dans un témoignage émouvant, Florence Alexis, fille de celui que ses amis appelaient Jacques Soleil, ne salue le “rêve fou de fraternité humaine” de son père et promette d’œuvrer à la disponibilité et l’accessibilité de ses œuvres, particulièrement pour la jeunesse haïtienne.
L’écrivain sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, lauréat du Prix Goncourt 2021, a témoigné de sa “dette à Jacques Stephen Alexis et aux écrivains haïtiens”, et précisé que c’est un “humanisme intégral” qui caractérise l’œuvre d’Alexis. Dans un message vidéo, S. E. M. Mauricio Vargas Linares, Ambassadeur, Délégué permanent de Colombie auprès de l’UNESCO, journaliste et écrivain, ami de Gabriel Garcia Marquez, a raconté une anecdote intime où Garcia Marquez reconnaissait en Jacques Stephen Alexis le véritable “père du réalisme merveilleux”.
L’écrivaine Yanick Lahens, Prix Femina 2014 pour son roman Bain de lune, a également, depuis Haïti, salué en Jacques Stéphen Alexis “un écrivain chevaleresque, militant et esthète, en avance sur son temps et dont la présence n’arrête pas de nous manquer.” Enfin, Doudou Diène, initiateur du projet de la Route de l’esclave à l’UNESCO, a rappelé que, lycéen, il a découvert Jacques Stéphen Alexis dans un contexte colonial au Sénégal où, pourtant, “les écoles faisaient en sorte que nous ne découvrions pas les idées produites hors de l’occident”. Il a également laissé entendre que “les esclaves ont développé une stratégie de résistance culturelle qui est la plus profonde de l’humanité. Une intelligence de résistance qu’Haïti et ses écrivains ont su matérialiser de façon fertile ».
Cette consécration par l’État haïtien de l’année 2022 comme « Année de la Belle Amour Humaine » est un hommage « tant à la poésie de la pensée, qu’à l’audace de la philosophie de Jacques Stephen Alexis », a souligné Dominique Dupuy, Ambassadeur, Déléguée permanente d’Haïti auprès de l’UNESCO.
Sous l’habile coordination de Madame Josette Bruffaerts-Thomas, enseignante, ces échanges tant émouvants qu’édifiants, ont duré exactement deux heures. En fin de séance, plusieurs Ambassadeurs à l’UNESCO ont également réagi sur l’auteur : Bénin, Éthiopie, Mauritanie, etc. Pour le professeur Jòzef Kwaterko, de l’Institut d’études romanes (Université de Varsovie), participant à distance à la conférence, l’écriture de Jacques StéphenAlexis est polyphonique et multiculturelle.
À quand un projet de traduction en créole des ouvrages de Jacques Stéphen Alexis? Telle a été la question posée par Michel Degraff, professeur au Massachussets Institute of Technology (MIT), participant à la rencontre. Ne serait-il pas un moyen d’incarner davantage l’idéal de Jacques Stephen Alexis dans l’être humain haïtien, et ce depuis les classes primaires ? C’est du moins ce qu’a commenté Joseph Wilson-Sydney, un autre participant. Quant au professeur Jean-Marie Théodat, il a salué cette initiative et s’est réjoui des interventions des différents panélistes.
« Les peuples sont des arbres qui fleurissent malgré la mauvaise saison; à la belle saison, notre arbre continue à vivre. Un peuple qui vient de produire un Jacques Roumain ne peut pas mourir », disait Jacques Stéphen Alexis. Dans les mêmes termes, on pourrait affirmer, comme l’a fait Mme Bruffaerts-Thomas, qu’ « un peuple qui vient de produire un Jacques Stéphen Alexis ne peut pas mourir ».À l’UNESCO, Jacques Stéphen Alexis a entamé son second centenaire ce vendredi 22 Avril 2022!