L’ancien candidat aux élections présidentielles de 2010 et 2015 prolongées en 2016 sort de son silence dans une adresse à la nation pour prendre position, dit-il, en faveur du peuple haïtien. Selon lui, en plus des promesses non tenues, de la mauvaise gestion du pouvoir en place, il a expliqué avec un luxe de détails pourquoi le président Jovenel Moïse doit partir le 7 février 2021. Nous publions in extenso son texte.
ADRESSE À LA NATION
Chers compatriotes,
Seule la Constitution est juge du mandat des élus. À cet égard, les articles 134-1 et 134-2 de la Charte de 1987 amendée sont péremptoires : le mandat du président Jovenel Moïse se termine le 7 février 2021. Et si, en raison de la longueur du processus électoral enclenché en 2015, des doutes devaient persister dans certains esprits tordus, obnubilés par l’ambition ou des fantasmes de longévité, la résolution du CEP de Léopold Berlanger les efface totalement en rappelant aux participants à ces joutes la règle constitutionnelle que le mandat des futurs élus, parlementaires et président, débutait dans l’année 2016. Résolution que d’ailleurs avait endossée le Core Group dans sa note du 9 novembre 2016 où il réitérait sa solidarité avec le peuple haïtien et saluait la volonté de tous de parachever le cycle électoral.
Ancien candidat à la présidence et principale victime du hold-up électoral du régime Tèt kale, sans jamais avoir concédé la victoire à M. Jovenel Moïse, j’ai choisi de faire très peu d’interventions tout le long de son mandat. Cette attitude procédait d’un souci purement patriotique de ne pas mettre d’entraves à la concrétisation des promesses électorales de ce candidat, du moment qu’elles pouvaient éventuellement apporter du bien-être à ce peuple que j’avais choisi de servir avec amour et dévouement.
Mais l’autocratie, l’autoritarisme, la mégalomanie et l’absence de vision de monsieur Jovenel Moïse ont jeté le peuple haïtien dans l’enfer de la misère, de l’insécurité et de l’instabilité. Alors, le silence n’est plus de mise.
Au lieu de « donner à manger au peuple haïtien et d’augmenter son pouvoir d’achat », la mauvaise gouvernance, le gâchis administratif et l’impéritie de l’équipe au pouvoir ont conduit à l’effondrement des institutions étatiques. Avec le pullulement des gangs armés, l’insécurité généralisée et le kidnapping, la peur s’est installée dans les foyers. Si rien n’est fait, « la guerre de tous contre tous » bouleversera les prochains jours et l’avenir de la nation.
Ma qualité de légaliste, d’institutionnaliste, d’homme de compromis et de dialogue, ma mission auto-choisie de vigile des valeurs démocratiques dans cette Haïti qui se cherche condamne sans appel le chaos, ainsi que l’anarchie, la violence et le dechoukaj.
Aussi ai-je décidé de rompre une fois de plus le silence pour en appeler à monsieur Jovenel Moïse et lui demander de respecter son serment et ses engagements constitutionnels. Qu’il se ressaisisse afin d’épargner au pays un bain de sang, car le peuple haïtien n’acceptera pas l’inacceptable ni ne supportera l’insupportable.
Chers compatriotes,
Aujourd’hui, le compte à rebours commence et marche inexorablement vers la sortie de monsieur Jovenel Moïse du Palais national le 7 février 2021. Je m’associe à vous, de tout mon cœur et de toute la puissance de ma conviction de patriote infatigable et incorruptible, pour monter la garde au chevet de cette Haïti qui dépérit sous la poigne maladroite d’une équipe sans vison ni idéal et qui a plongé notre patrie dans les affres de la misère, de l’insécurité, du kidnapping et de la peur.
« Bon combat » pour la reconquête de notre dignité et de notre souveraineté, pour une Haïti libre, indépendante, démocratique, prospère et solidaire.
Vive Haïti !
Patriotiquement,
Jude CÉLESTIN
Port-au-Prince, le 3 février 2021