« Les perspectives macroéconomiques pour Haïti restent floues », mais un climat de sécurité stable pourrait améliorer la croissance, selon le FMI
Le Fonds monétaire international (FMI), dans son dernier rapport sur Haïti publié le 10 décembre 2024, a souligné que les conditions macroéconomiques du pays restent difficiles, avec cinq années consécutives de croissance négative (2019-2023). « La croissance du PIB réel a été négative de 1,9 % pour l’exercice 2023, qui s’est achevé en septembre 2023. Ceci reflète les perturbations de la production, des exportations et de la distribution des biens et services (y compris l’énergie) sur les marchés locaux. L’économie s’est effondrée entre mars et mai 2024 et ne s’est pas encore totalement rétablie », peut-on lire dans ce rapport.
Le choc sur l’offre provoqué par la crise sécuritaire a fortement alimenté l’inflation et aggravé la crise de la faim. Après 10 mois de baisse constante, l’inflation a recommencé à augmenter en février 2024, atteignant 27,9 % (en glissement annuel) en septembre. Face à cette situation, le FMI conclut que « les perspectives macroéconomiques d’Haïti restent floues ».
Projections de croissance et impact de la sécurité
« La croissance pour l’exercice 2024 (terminé en septembre 2024) devrait être négative (pour la sixième année consécutive), à moins 4 %. La croissance pourrait atteindre 1 % au cours de l’exercice 2025 et 1½ % à moyen terme si la situation sécuritaire s’améliore. Mais de nouveaux troubles sociaux continueraient à perturber l’activité économique », précise le FMI à la page 11 de son rapport de 171 pages.
Toujours selon le rapport, si la criminalité (représentée par le taux d’homicide) était ramenée aux niveaux d’avant la pandémie, l’impact sur la croissance pourrait atteindre 1,9 point de pourcentage par an à court et moyen terme, et 1 point de pourcentage à long terme.
En outre, les analystes du FMI estiment que le niveau du PIB à moyen et long terme pourrait augmenter de 5 à 15 % si les écarts de genre, notamment en termes de participation au marché du travail, se résorbaient. « L’augmentation du PIB serait encore plus importante si les écarts en matière d’éducation étaient comblés », souligne le rapport.
Défis exceptionnels et impact de la violence
Le FMI rappelle qu’Haïti est confronté à des défis exceptionnels. Depuis la dernière consultation au titre de l’article IV en 2019, la situation sécuritaire s’est détériorée, atteignant des proportions critiques au cours des premiers mois de 2024. Entre mars et mai 2024, des gangs ont contrôlé 80 % de la capitale, paralysant l’activité économique, perturbant les chaînes d’approvisionnement, détruisant de nombreuses infrastructures, et ravivant les pressions inflationnistes.
Le rapport précise que l’escalade de la violence a eu des conséquences dévastatrices : destruction du capital humain et physique, augmentation du nombre de personnes déplacées, et accélération de la fuite des cerveaux dans un pays déjà classé comme fragile et à faible revenu.
Recommandations et espoirs du FMI
Le FMI estime que le gouvernement actuel dispose d’une marge de manœuvre limitée pour mettre en œuvre des réformes pouvant contribuer à restaurer le potentiel économique du pays à moyen et long terme.
Les transferts officiels pourraient augmenter si les pays de la région et au-delà soutiennent l’opération menée par le Kenya, avec des financements supplémentaires, ainsi que la reconstruction d’Haïti.
La normalisation de la situation sécuritaire pourrait améliorer significativement les perspectives économiques à moyen terme. Combinée à une stratégie solide de lutte contre la corruption, cette normalisation pourrait favoriser le retour des investissements directs étrangers (IDE) et des talents ayant quitté le pays.
Cependant, si les risques de détérioration se concrétisent, un soutien supplémentaire des donateurs, notamment sous forme de subventions, sera essentiel pour préserver la stabilité macroéconomique et financer les dépenses prioritaires, tout en évitant une dépendance accrue à la politique monétaire.
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