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Éditorial

« Nous marchons dans la vallée de l’ombre de la mort »

« Nous marchons dans la vallée de l’ombre de la mort »

« Après une importante rencontre avec les plus hautes autorités responsables de la sécurité du pays, j’ai passé des instructions formelles en vue de prendre des mesures urgentes pour contrer les bandits armés qui menacent la paix dans les foyers et la sécurité publique ». Le Président Jovenel Moise a posté ce tweet le 16 avril dernier pour tenter de rassurer le pays tenaillé par l’insécurité, exposé aux violences des bandes armées qui contrôlent certains quartiers de Port-au-Prince mais aussi plusieurs régions dans d’autres départements du pays dont l’Artibonite.

Le même jour, le Premier ministre nommé qui croit que le pays fait face à une guérilla a annoncé des mesures pour combattre les violences armées. Les annonces, à travers des tweets, du Président Moise, qui vraisemblablement n’a plus le courage de regarder la population dans les yeux, les déclarations de Jean Michel Lapin n’ont pas empêché, entre autres forfaits, le viol collectif de missionnaires à l’Estère dans l’Artibonite par des hommes de Arnel Joseph et ceux du gang opérant dans la localité de Savien à la Petite-Riviere de l’Artibonite. Elles n’ont pas inquiété non plus la bande à Tijé, le chef de gang de Savanne Pistache, qui a revendiqué la tuerie de l’Impasse Eddy à Carrefour-Feuilles mercredi soir faisant près d’une dizaine de morts et des blessés.

Une semaine après ces annonces, qui sans doute, n’ont été accompagnées d’aucune mesure pour renforcer la Police Nationale en terme de moyens et d’équipements ; quelques heures après la boucherie de Carrefour-Feuilles, Jean Michel Lapin revient pour informer que les véhicules immatriculés OF, SE notamment n’auront aucune considération spéciale dans les lieux d’opérations policières. « Tout plak tonbe » a ajouté le Premier ministre comme pour dire implicitement à la population qu’elle doit se méfier de ses dirigeants. Certains d’entre eux dont des élus, des proches de l’exécutif, des officiers ministériels seraient de mèche sinon de connivence avec des bandits notoires, ils les protègent. Et cette fois, le Premier ministre nommé était accompagné du commissaire du gouvernement de Port-au-Prince, Paul Eronce Villard qui a exprimé sa colère par rapport à la déchéance morale et éthique dans laquelle est plongé le pays. « Dans tous les pays du monde, un officiel soupçonné de connivence avec un bandit devait démissionner » a lancé sans aucune hésitation le chef de la poursuite.

Après avoir entendu ces propos, tellement rassurants d’un chef de gouvernement et d’un commissaire de gouvernement, les Haïtiens et Haïtiennes qui respirent la peur, l’inquiétude, l’incertitude, qui ont peur même de leur ombre… devraient pouvoir pousser un ouf de soulagement. Cependant, quand on se réfère à la réalité des agents de la police nationale notamment ceux des unités spécialisées, dépourvus d’équipements, contraints au découragement parce qu’ils n’ont pas reçu leurs primes de risque depuis plusieurs mois, on ne peut s’empêcher de demander à la population qui marche dans la « vallée de l’ombre de la mort », qui a raison d’avoir peur même de son ombre, de patienter longtemps encore mais surtout d’être vigilante en attentant que les annonces des dirigeants soient formellement concrétisées.

Nous nous habituons tellement à ce genre de discours, ces types d’annonces qui n’ont jamais été suivies d’effets. Combien de fois nos dirigeants ont-ils promis que les bandits armés qui sèment le deuil dans les foyers seront traqués jusque dans leurs derniers retranchements ? Combien de fois ont-ils invité les bandits armés à changer de métier s’ils ne veulent pas mourir? Et puis… on connait la suite.

Nous marcherons encore longtemps dans la « vallée de l’ombre de la mort », et nous devons craindre tout mal car les bandits armés gagnent du terrain, ils imposent leurs lois.  Tant que des armes de guerre et de munitions continuent de passer par nos points frontaliers non contrôlés, dépourvus de toutes infrastructures étatiques, tant que des containers d’armes et de munitions continuent de disparaitre dans nos ports privés et publics pour aboutir finalement aux mains des sans foi ni loi, des terroristes, des bandits… nous devons craindre tout mal en gardant l’espoir, bien sûr que les dernières mesures annoncées par nos dirigeants pour contrer les actions des gangs armés, rétablir l’ordre et la sécurité donneront les résultats escomptés.

MRP.-

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