Invité à analyser la situation économique du pays sur VOA Kreyòl à Washington la semaine dernière, l’économiste haïtien Etzer Émile a déploré le fait que les politiques haïtiens accordent la priorité à la politique au détriment de la réflexion économique. En Haïti, a-t-il dit, l’économique est prisonnier du politique. On a l’impression que l’économie ne figure jamais dans l’agenda de l’homme politique haïtien. Ce dernier, estime Etzer Émile, ne pense qu’aux élections.
« On n’est pas dans une logique de réflexion sur comment trouver la formule de croissance économique. On ne réfléchit pas sur les stratégies pour passer de l’étape d’un pays pauvre à un pays à revenu moyen. L’on préfère s’adonner à des jeux de prise, de conservation ou de passation de pouvoir » regrette-t-il.
L’économiste croit que la mentalité haïtienne y est pour quelque chose. « On est pratiquement dans une logique de survie permanente, d’instinct de conservation alors on s’inscrit pas dans la durée, on ne croit pas en quelque chose d’envergure » déclare-t-il. C’est dans cette optique que le professeur dit plaider pour l’émergence d’une autre génération de leaders. Car, affirme-t-il, certains ont prouvé leurs limites, les mauvaises intentions qui les animent. Ce, qu’il s’agisse de ceux qui sont au pouvoir, qu’il s’agisse de l’opposition ou certains groupes du secteur des affaires. « Avoir en 2019 le pays le plus pauvre de l’Amérique, c’est un échec pour la génération des 30 dernières années » affirme Etzer Émile.
Il croit que la logique d’attribuer la situation catastrophique de l’économie du pays au « blanc » n’est que prétexte. Car, explique-t-il, des pays comme le Chili, le Costa-Rica, entre autres, sont privatisés et écoutent également les gendarmes du système économique internationale.
L’auteur de l’ouvrage « Haïti a choisi de devenir pauvre » attribue cette situation déplorable à la malhonnêteté, au système d’impunité et de corruption établis dans le pays.
Pour Etzer Émile, le changement passe par l’émergence d’une autre vision avec une mentalité qui placera Haïti au centre. « Si le pays n’est pas au centre, les actions posées n’iront pas dans le sens de l’intérêt collectif » prévient le professeur.