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A Paris, ce 10 Novembre 2023, Haïti et le Bénin étaient à l’honneur à la salle René Monory au Palais du Luxembourg, siège du sénat français. En effet, à l’initiative du groupe d’amitié France–Caraïbe au Sénat, présidée par la sénatrice Hélène Conway-Mouret, se tenait une conférence sur les expériences d’Haïti et du Bénin en matière de révision constitutionnelle et stabilité démocratique.
Deux panélistes étaient à l’honneur. D’un côté, Maître Robert Dossou, ex député du Bénin, ancien président de la commission des lois, ex ministre des affaires étrangères, ex Président de la Cour constitutionnelle du Bénin, ex doyen de l’Université nationale du Bénin. De l’autre, Jerry Tardieu, ex député d’Haïti, qui présidé une commission parlementaire spéciale chargée de proposer des amendements à la constitution haïtienne.
C’est la sénatrice de la Martinique l’Honorable Catherine Conconne qui a introduit et modéré le débat, en prenant soin de rappeler les liens entre le Bénin, Haïti et la Martinique solidement unis par l’histoire et la négritude si chère à Aimé Césaire. Elle s’est félicitée que l’activité se tenait en France et faisait salle comble. Elle rappela que des activités d’une telle portée aidaient au cheminement des idées porteuses de démocratie et de stabilité institutionnelle. Ensuite ce fut au tour des deux intervenants de s’exprimer abondamment.
D’entrée de jeu, Jerry Tardieu annonça la couleur. Selon lui, Haïti aurait intérêt à faire en 2024 ce qu’a fait le Bénin en 1990, c’est-à-dire tenir une conférence nationale qui pourrait favoriser une révision constitutionnelle. L’ex député rappela à l’assistance qu’Haïti se retrouve aujourd’hui dans une situation similaire à celle qu’a connu le Bénin il y a trois décennies. A cette époque, expliquait-il, le Bénin était secoué par une terrible crise politique, sociale, économique, institutionnelle. L’espoir était mort. Les béninois quittaient le pays par milliers. Le tissu social était en lambeaux. L’insécurité régnait. La classe politique était balkanisée et divisée. Le Président d’alors Mathieu Kérékou était en difficulté et souffrait d’un déficit de légitimité qui ne lui permettait pas d’organiser des élections dont le résultat ne serait pas contesté. En bout de ligne, c’est la tenue d’une grande assise nationale qui va débloquer la situation. Connue comme la Conférence Nationale des Forces Vives du Bénin, elle fut organisée par Robert Dossou l’autre conférencier du jour.
D’un ton convaincant, le brillant avocat et professeur Robert Dossou partagea son expérience comme président de la Commission préparatoire de la conférence nationale du Bénin. Il garda l’assistance en haleine en expliquant avec passion comment il avait bataillé pour réaliser ces assises politiques au moment où le pays était une poudrière au bord de l’explosion. Il souhaite que les élites haïtiennes puissent en faire de même. Maitre Dossou est d’avis que la conférence nationale du Bénin peut servir d’inspiration pour Haïti car c’est elle qui a permis d’amorcer les prémisses d’un renouveau politique de son pays.
Jerry Tardieu abonda dans le même sens. « Cette conférence nationale permit de rétablir la sécurité, de mettre le pays en mode élection et de ramener la stabilité, la sécurité et la prospérité économique. N’est-ce pas ici le grand défi qui attend Haïti, la voie à suivre ! »
L’assistance cosmopolite était composée en grande partie de ressortissants africains, caribéens, africains et haïtiens. On pouvait remarquer certaines personnalités haïtiennes vivant à Paris dont l’artiste Amos Coulanges, la philanthrope Josette Brueffarts, le professeur Jean-Marie Théodat, la directrice de la maison des journalistes Darline Cothière, l’analyste politique Jacques Nessi, la directrice de Boyo Haiti Lourdy Morlan, la présidente de l’Association Haïti pour l’avenir Marie Emelide Joseph, le responsable de En Avant d’Europe Saint-Jean Joseph. Quelques diplomates et ex ambassadeurs haïtiens, béninois et européens avaient également pris part à l’activité.
Selon Tardieu, « le Bénin est un exemple pour les forces vives haïtiennes qui doivent un jour comprendre la nécessité d’un dépassement de soi pour travailler à un projet national haïtien qui transcende les partis, un dénominateur commun minimal des forces vives haïtiennes ». Mais conférence nationale ou pas, Tardieu fait le pari qu’une dernière bataille pour la révision constitutionnelle est nécessaire sur certains champs importants. Parmi eux, l’harmonisation du temps électoral au temps constitutionnel, l’équilibre des pouvoirs, le renforcement des institutions comme le CEP, la gouvernance administrative, de la lutte contre la corruption, l’indépendance de la justice et l’intégration de la diaspora.