Péages imposés par les gangs : les citoyens doivent payer pour circuler librement en Haïti, notamment dans la capitale.
Dans un contexte où l’insécurité et la violence gangrènent le quotidien des haïtiens, une forme de terreur s’installe : les péages imposés par les gangs. Ce phénomène, en nette augmentation ces derniers temps, contraint les citoyens à payer des sommes exorbitantes pour circuler librement dans leur propre pays, et notamment dans la capitale, Port-au-Prince.
Depuis plusieurs années, la situation sécuritaire en Haïti ne cesse de se détériorer. Les gangs armés, profitant du vide institutionnel et de la faiblesse des forces de l’ordre, ont pris le contrôle de plusieurs quartiers et axes routiers stratégiques. Dans ces zones, les criminels imposent des péages, obligeant les citoyens à verser des sommes d’argent pour pouvoir circuler.
Selon un rapport récent du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH), les gangs armés ont établi au moins treize postes de péage clandestins, imposant des rançons aux citoyens sur les principales routes de la capitale et dans d’autres régions du pays.
Les automobilistes, les transporteurs, et même les piétons sont contraints de payer sous la menace de violences physiques ou de représailles. « Chaque jour, je dois payer pour faire le trajet. C’est devenu insupportable », témoigne un chauffeur d’autobus à Juno7. « Si je refuse de payer, non seulement ils peuvent me voler mon autobus, mais ils peuvent aussi me tuer ou m’enlever avec les passagers. Je n’ai pas le choix ».
Marie (nom d’emprunt), une commerçante, partage un sentiment similaire. « Pour aller chercher mes marchandises dans le Sud, je dois traverser plusieurs barrages tenus par les gangs. À chaque fois, je dois donner de l’argent. Cela réduit considérablement mes bénéfices et met en péril mon activité ».
Les conséquences de cette situation sont multiples et désastreuses. Les péages imposés par les gangs entravent la libre circulation des personnes et des biens, affectant directement l’économie locale. Les coûts de transport augmentent, les prix des denrées alimentaires et des biens de consommation flambent, et les activités commerciales ralentissent.
Le RNDDH a précisé l’emplacement exact de ces treize postes de péage dans son rapport, détaillant leur répartition géographique. À Port-au-Prince, trois postes de péage ont été installés : l’un à la Ruelle Alerte, à proximité du cimetière de Port-au-Prince, un autre à Martissant, et un troisième à Fontamara. Dans la commune de Cité Soleil, trois autres postes ont été mis en place à la sortie du Terminal Varreux, à La Saline et à Drouillard.
Les routes nationales ne sont pas épargnées par cette pratique illicite. Sur la route nationale #1, deux postes ont été érigés à Titanyen et entre Saint-Marc et Gonaïves. La route nationale #2 compte également deux postes, situés à Paloma près du cimetière de Carrefour et à Mariani. La route nationale #3 est touchée par un poste à Onaville 12, tandis qu’un poste a été installé sur la route nationale #5 entre Gros Morne et Port-de-Paix. Enfin, un autre poste de péage a été recensé sur la route nationale #8, à Calvaire, Croix-des-Bouquets.
Face à cette situation, les autorités haïtiennes semblent démunies. Les forces de l’ordre, souvent sous-équipées et en sous-effectif, peinent à rétablir l’ordre et à sécuriser les zones contrôlées par les gangs. Les initiatives ponctuelles pour démanteler ces groupes armés se révèlent insuffisantes et laissent place à une réoccupation rapide des territoires.
En attendant une réponse efficace des autorités et la venue de la force multinationale en Haïti, la peur et la frustration continuent de croître parmi les habitants de Port-au-Prince et des autres régions touchées.
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