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Haïti

Plaidoyer pour la tenue de la commémoration de la journée de l’indépendance

HOMICIDE, PARRICIDE, INFANTICIDE, FEMINICIDE…

Le langage symbolique permet de redéfinir le monde, de relier l’homme à l’invisible et d’harmoniser les contraires. Toujours entre deux infinis, la conscience de l’homme a besoin de ce langage pour réussir à dialoguer avec les mystères de la vie et de la mort. Seul le symbole permet de saisir l’unité derrière les oppositions. Comme tout langage, il répond à des règles bien précises, mises en œuvre par toutes les cultures de l’humanité. Le symbolisme, comme système de pensée, est la fusion des oppositions au sein de l’unité. Il est le centre du triangle, le point de confluence des bissectrices et des médianes. Il peut constituer le cœur de la raison humaine.

Le rôle du cours d’histoire est donc de lier connaissance aux symboles, le contexte et la vie de ceux qui ont eu un impact sur le cours de l’Histoire. Cela veut dire aussi réfléchir comment certains d’entre eux peuvent perdre ou prendre une autre valeur avec le temps. En outre, l’histoire a légué des symboles qui se retrouvent dans des œuvres d’art et des monuments faits à la mémoire de disparus. Grosso modo, le symbolisme est essentiellement inhérent à tout ce qui présente un caractère traditionnel. Ainsi, John Gardner, à travers son ouvrage titré « L’homme soleil », eut à dire que le monde est un interminable défilé de symboles.

Indépendant le 1er janvier 1804, Haïti, l’ancienne colonie française de Saint-Domingue, acquiert un fort statut symbolique. Première guerre perdue par une puissante armée européenne face à des insurgés extra-européens depuis plusieurs décennies, première révolte couronnée de succès dans l’Histoire moderne, première République noire libre du monde. D’où, ce 1er janvier 2020 marquera le 216ème anniversaire de l’indépendance d’Haïti. Suivant la crise socio-politique actuelle qui secoue le pays, la classe politique ne s’entend pas encore sur la commémoration de l’indépendance aux Gonaïves, la quatrième ville d’Haïti marquée par des moments de gloire et des événements funestes. Ce comportement méprisant face au devoir historique est considéré comme un affront à la mémoire de nos ancêtres, car ce n’est pas parce que le secteur de l’Opposition se lance, sans merci, dans une bataille contre le régime politique en place que la vie n’a aucun sens d’être vécue chez nous et que le Jour de l’Indépendance ne mérite pas d’être amplement célébré.

Sur ces entrefaites, je plaide pour la tenue de la commémoration de l’indépendance en bonne et due forme au nom du sang versé de nos Ascendants anti-esclavagistes. Il faut s’approprier de nos patrimoines. Donc, un appel solennel est lancé à l’endroit de toutes les filles et de tous les fils du pays afin de faire taire nos différends à l’occasion de cette noble journée. Le Président de la République, M. Jovenel Moïse, de son coté, doit s’animer de la volonté d’aller honorer la mémoire de nos vaillantes femmes et vaillants hommes dans la Cité de l’indépendance au même titre que Le Président Nord Alexis avait déclaré à l’occasion de la commémoration du centenaire de l’indépendance et à l’encontre de ses opposants : « je serais à mon lit de mort, je me ferais porter sur un brancard. Mais j’irai aux Gonaïves le 1er janvier 1904 pour glorifier les Ancêtres » ainsi que le Président Jean Bertrand Aristide qui avait fait tout ce qui était dans son pouvoir pour ne pas rater la célébration du bicentenaire de l’Indépendance aux Gonaïves, le 1er janvier 2004. Même s’il ne s’agira pas encore du tricentenaire de l’indépendance, mais le 1er janvier 2020 sera, de toute façon, la journée symbolique de la proclamation de l’indépendance d’Haïti qui n’est aucunement un jour ordinaire. En effet, l’an 216 ne doit pas passer de façon inaperçue. Comme Dr Rosalvo Bobo l’avait mentionné dans son texte en 1903 à propos du centenaire de l’indépendance, l’idée de se rendre aux Gonaïves ne consiste point d’aller festoyer mais plutôt de demander ’’pardon à Dessalines, à Toussaint, à Capois, à toute la phalange immortelle de notre histoire. Pardon de notre ingratitude. Pardon de nos folies. Pardon de nos parjures et de notre croupissement’’.

Faisons grâce au monde qui nous sait exister. Cessons de profaner nos symboles et nos héritages culturels pour des intérêts mesquins. Laissons la chance à la diaspora haïtienne de venir partager la « soupe joumou » avec leur famille. Une pratique traditionnelle qui est en voie de disparition malheureusement.

Jacques Lauture
Sociologue de formation
[email protected]

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