Pierre Espérance du RNDDH écrit à Joseph Jouthe sur la situation des droits de l’homme dans le pays.
Dans une lettre adressée à Joseph JOUTHE, président du Conseil Supérieur de la Police Nationale (CSPN), le secrétaire exécutif du réseau national de défense de droits humains (RNDDH) a fait le point sur la situation des droits humains dans le pays en mettant l’accent notamment sur le respect de la liberté d’expression, l’insécurité et la montée en puissance des gangs armés au grand dam de la population. Pour les seuls mois de mai et de juin 2020, cinquante-quatre (54) personnes au moins ont été assassinées par balles ou à l’arme blanche.
Le réseau national de défendre de droits humains, (RNDDH), dans cette lettre, se dit préoccuper par la violation systématique des libertés d’expression et de réunion du peuple haïtien par les agents d’unités spécialisées de la Police Nationale d’Haïti (PNH) qui pourtant, font preuve d’une grande complaisance vis-à-vis des bandits armés, s’empresse d’attirer l’attention du chef du gouvernement sur cet état de fait, en vue d’un redressement immédiat de la situation.
Le RNDDH rappelle au PM Jouthe, qui a entamé des démarches auprès des organisations de droits humains récemment pour s’enquérir de la situation dans le pays, que la situation chaotique dans laquelle vit le peuple haïtien témoigne de l’échec du président Jovenel MOÏSE et de tous les chefs de gouvernement qui se sont succédé: les droits à la vie, à la santé, au travail, à l’éducation, à l’identité, à l’alimentation, à la sécurité physique et à un niveau de vie suffisant du peuple haïtien sont constamment violés sinon carrément ignorés.
« Haïti patauge dans une grande misère. Les produits de première nécessité sont inaccessibles et la famine guette la majorité de la population alors que les actes de corruption au sein de l’administration publique à savoir surfacturation, opacité dans les dépenses de l’Etat, détournements et dilapidation de fonds publics, sont continuellement dénoncés. Aujourd’hui, des personnes sont assassinées partout dans le pays, dans les quartiers défavorisés, en pleine rue, dans leurs résidences, etc. Cadres de l’administration publique, employés-es du secteur privé, commerçants-tes, chauffeurs de transport en commun, agents-tes de la PNH, écoliers-ères, citoyens-nes, hommes, femmes, enfants : Les autorités étatiques ayant à leur disposition agents de sécurité et agents de la PNH détachés mis à part, personne n’est épargné », a indiqué le RNDDH.
La gangstérisation du pays renforcée par la fédération des gangs armés avec la bénédiction des autorités au pouvoir, à la barbe du Conseil Supérieur de la Police Nationale (CSPN) que vous présidez, ont certainement aggravé la situation.
Il ne fait aucun doute que si elle existe, la politique de votre gouvernement en matière de sécurité publique est totalement inapte à établir et maintenir l’ordre sur le territoire national, a ajouté le RNDDH.
C’est la raison pour laquelle le RNDDH vous saurait gré de rappeler :
• Au Directeur Général de la PNH, Normil RAMEAU que l’institution policière défaillante qu’il dirige ne doit pas s’en prendre à la population qui dénonce son inertie face aux nombreux cas d’assassinats enregistrés dans le pays et l’utilisation de ses matériels dans la perpétration d’attaques armées à l’encontre de ceux et celles qui vivent dans les quartiers défavorisés. La PNH ne peut non plus reprocher aux manifestants-tes ses trop nombreux agents qui sont enrôlés dans les gangs armés et/ou protègent ces gangs au détriment de la population. Au contraire, elle doit s’atteler à rechercher les bandits ainsi que tous autres contrevenants à la Loi et à les déférer par devant les autorités judiciaires pour les suites de droit.
• A l’Inspecteur général en chef de la PNH, Hervé JULIEN, que le pays en général n’a que faire de sa magnanimité vis-à-vis des agents de la PNH dans la perpétration d’actes de violation des droits humains. Il attend de lui la prise de sanctions sévères à l’encontre de tous policiers ayant accepté d’obéir aux ordres manifestement illégaux de s’attaquer aux manifestants-tes pacifiques et de ne pas intervenir lorsqu’il s’agit de bandits armés qui décident de faire une démonstration de leurs forces, ce, quels que soient les grades et rangs de ceux qui ont passé ces ordres illégaux.
• Au Ministre de la Justice et de la Sécurité Publique Maître Lucmanne DELILLE, qu’il ne peut de son côté développer une hostilité vis-à-vis de la population haïtienne alors qu’il avait péremptoirement déclaré dans plusieurs médias qu’il mettrait fin rapidement à cette insécurité chronique qui sévit dans le pays et à l’impunité dont jouissent les chefs et membres de gangs armés.
Le RNDDH en a profité pour souligner à l’attention du premier ministre que la Constitution en vigueur et la Loi régissant la matière n’indiquent aucune zone interdite aux manifestations des rues en Haïti. Par conséquent, la rue où se trouvent les locaux du Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique n’appartient pas en propre à Maître Lucmanne DELILLE ni à aucun autre membre du CSPN. Il s’agit d’une voie publique où des réunions et manifestations peuvent être tenues. Et, seule une amélioration de la situation sécuritaire du pays et la fin de l’impunité empêcheront la réalisation de mouvements dénonçant les incompétences de votre gouvernement.
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