Sumfest: entre conscience et réjouissance, le peuple haïtien a fait son choix.
On dirait que tout allait bien dans la capitale haïtienne le 31 juillet dernier lors du festival annuel Sumfest qui s’est déroulé pour une quatrième fois sans aucun incident. On dirait que tous les problèmes étaient résolus dans le pays. La Côte des Arcadins était le lieu d’attraction des haïtiens et haïtiennes qui voulaient se réjouir alors que plusieurs semaines de cela, la route qui mène à ce lieu était un peu déserte et provoquait une peur bleue chez la population à cause de la présence des gangs armés à Canaan où des individus armés font la loi et terrorisent les habitants.
La guerre des groupes armés Chen Mechan et 400 Mawozo a fait des dizaines de morts dans la commune de Croix-des-Bouquets et ses zones avoisinantes ces dernières semaines, obligeant certains citoyens à quitter la zone pour se réfugier dans d’autres endroits plus ou moins calmes. Jusqu’à maintenant, les gens sont toujours en grande difficulté pour circuler librement. Des familles ont perdu des proches à cause de cette guerre. Plusieurs habitants de cette commune considérée désormais comme zone de non-droit, vivent avec les séquelles de cette guerre.
Même cas de figure dans la commune de Cité Soleil où des groupes armés de ce quartier populaire et ceux du bas de Delmas ont déclenché depuis le début du mois de juillet une guerre sans merci qui a causé la mort de plusieurs dizaines de citoyens. D’autres ont eu le temps de s’échapper pour s’installer dans d’autres zones. Plus de 300 enfants ont aussi déserté la commune. Plusieurs d’entre eux se trouvent actuellement à Saint-Louis de Gonzague et ne savent même pas quand ils pourront rentrer chez eux et retrouver leur domicile.
Malgré tous ces problèmes auquel est confronté le pays et qui font la une des journaux au quotidien, lorsqu’il s’agit de faire la fête, tout est rentré provisoirement dans l’ordre.
Les artistes s’étaient mobilisés pour offrir aux participants des prestations à la hauteur de l’attente de ce public en liesse et assoiffé de plaisir. Ce même groupe d’artistes a souvent quitté le territoire national pour s’installer en terre voisine à cause de l’insécurité. Mais, la quatrième édition du festival tant apprécié par les haïtiens les a poussé à faire un front commun pour faire de cette activité une réussite. Des reproches ont été faits sur les réseaux sociaux envers quelques groupes ou artistes qui n’ont jamais pris de position ouvertement contre la situation sociopolitique du pays alors qu’ils ont toujours répondu présents lorsqu’il s’agit de faire la fête.
C’est dans la même veine que Mathe Vladimir Stefano, jeune consultant en politique, croit que la population a pour devoir de se mobiliser. Toutefois, il estime que cette démarche est possible si le peuple est vraiment conscient des difficultés auxquelles il est confronté. Mathe Vladimir Stefano a aussi souligné que cette prise de conscience pourrait déboucher sur une série de revendications ordonnées.
Haïti est dans le coma. Les lignes ne bougent presque pas. Les conditions sécuritaires n’ont pas changé. La ville entière est sous l’obédience des hommes armés qui dictent leur loi, tuent et violent. Désenchantés, les citoyens disent vouloir respirer, soupirer dans l’espoir de stopper l’hémorragie, la dépression face à l’insécurité et la criminalité. “Comment planifier pour se rendre à Sumfest sans pouvoir ensuite rentrer chez-vous car on va vous tuer, vous enlever, vous voler ou vous tirer dessus… “ Ces commentaires ont souvent fait le tour des réseaux sociaux. Le public a-t-il bravé le danger pour se réjouir sans se soucier de cette crise?
Dans un pays où manger devient un luxe alors que la majeure partie de la population qui vit sous le seuil de la pauvreté n’exige rien, la majorité des artistes n’a pris aucune position ouvertement, les membres de la population ont choisi de faire la fête dans les festivals, bals, les programmes « Atè Plat ». On a l’impression que le pays va bien, tout est rentré dans l’ordre.
Pendant ce temps-là, une marchande d’épices a été enlevée à Martissant le 28 juillet dernier. Le journaliste Edner Fils Décime est entre les mains de ses ravisseurs depuis plus de quinze jours. Des membres du groupe FAZZ ont été enlevés à Bassin Bleu sans compter d’autres victimes du kidnapping. Récemment des dizaines de citoyens ont été blessés ou tués par des balles perdues lors des affrontements entre gangs armés au Centre-Ville de Port-au-Prince, la cathédrale transitoire de Port-au-Prince a été incendiée lors de ces affrontements. La population est sur le qui-vive face à l’inflation. Ça ne veut rien dire pour un peuple qui est en train de contempler sa propre misère.
La PNH avec ses faibles moyens fait des efforts pour contrer les actions des bandits armés afin de permettre à la population de respirer et vaquer librement à ses activités. L’institution policière a fait d’importants coups ces derniers jours en saisissant des armes et munitions à la douane de Port-de-Paix et Port-au-Prince. Plusieurs individus ont été appréhendés et d’autres ont été tués lors des échanges de tirs. Des opérations ont été menées dans des quartiers afin de démanteler des réseaux de gang. Malgré tout cela, il reste beaucoup à faire pour cette institution souvent critiquée par des citoyens et citoyennes.
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